Ces trois films ont été réalisé à l'intérieur de l'ancienne piscine municipale de la ville de Colmar, fermé au public depuis 2003. Les films ont été réalisés durant cette période de fermeture entre 2009 et 2011. En 2016 le bâtiment a été réhabilité et ouvert au public pour accueillir les collections du Musée Unterlinden.
Au fur et à mesure de la construction du montage entre les trois films, le Retable d'Issenheim de Grunwald est devenu de plus en plus présent. Un livre aussi nous a relié au cours du montage : « Noli me tangere » de Jean Luc Nancy. Ce livre, nous semble révélateur de notre manière, à chacun singulière, de nous inscrire dans un lieu. Je reste à distance, je pose mes caméras et j'attends que le temps se dépose, dans la lenteur de la lumière retenue à la surface de la matière qu'elle rencontre. Emmanuelle traverse l'espace avec son corps, elle vient le toucher, l'effleurer, avec le mouvement ample de sa robe. Elle filme le mouvement de son corps et la trace qu'il laisse sur son passage. Elle flotte dans l'absence de l'eau, dans la matérialité devenue visible de la lumière. Relation entre l'intérieur du bassin, la proximité bleue du carrelage au sol, et l'immobilité apparente de mes deux films, réalisés aux deux extrémités de la piscine. Il nous semble voir, dans cet agencement, une relation avec le retable, le moment où le christ dit à Marie Madeleine « Noli me tangere » en désignant sa destination, le ciel, et en repoussant son corps, pour lui signifier qu'il n'est déjà plus là. Moment suspendu entre un départ et la présence déjà absente.
D'un côté, l'éloignement de ce que l'on ne peut atteindre, ni toucher, le mouvement de la lumière dans son apparente immobilité, et au centre du triptyque, une immersion possible dans laquelle la lumière et le corps naissent l'un dans l'autre.
Une rétention du souffle d'un côté et une respiration ample de l'autre. Cette respiration devient la forme visible de la relation du corps avec son environnement, son milieu, le vide occupé par l'air et la lumière dans le vide du bassin, dans le vide de l'air, dans une porosité avec l'extérieur, les sons ralentis qui nous parviennent et transforment le vide en réceptacle.